Ces Nord-Américains qui prennent la nationalité russe ! | KHL / Russie – Hockey sur glace
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Dans une KHL qui peine à attirer des vedettes étrangères vers une Russie de plus en plus isolée dans le monde du hockey sur glace, le quota de joueurs étrangers a été réduit de 5 à 3 sur demande de la fédération.
Mais à quoi servent ces quotas si le règlement est contourné ? Cette question qui s’est souvent posée dans des pays d’Europe de l’Ouest (comme l’Allemagne ou la Suisse), les Russes se la posent avant leur tour après quelques naturalisations inattendues : pendant que certains jeunes hommes ont fui leur pays pour échapper à la mobilisation pour une guerre dont ils ne comprennent pas les raisons, des hockeyeurs nord-américains à contre-courant choisir de devenir russes !
C’est ce que vous découvrirez dans le premier volet de notre présentation KHL, qui se déclinera comme le soleil, d’Est en Ouest.
La division Chernyshyov, la plus à l’Est, ne semble dégager aucun favori net capable de se mêler à la conquête du titre. L’Avangard Omsk est normalement le club le plus puissant mais a vécu un été très agité. Son célèbre président – connu par la Formule 1 – Aleksandr Krylov a quitté son poste de manière inattendue, laissant une terre quelque peu brûlée (c’est d’actualité puisqu’on a frisé les +40°C un peu partout en Sibérie cet été). Après les négociations vouées à l’échec pour faire revenir Bob Hartley, l’entraîneur Mikhaïl Kravets – qui a repris l’équipe avec succès en cours de saison mais a peu d’expérience – apparaît un peu comme un choix par défaut. En tout cas, il a toutes les raisons de le vivre comme tel car on lui a juste offert de resigner pour un an… alors que ses adjoints Aleksandr Svitov et Sergey Zvyagin ont deux ans de contrat !
Surtout, les anciens dirigeants s’étaient lancés dans une guerre ouverte avec l’agent Shumi Babayev… qui a tourné à leur désavantage. L’interview du capitaine Damir Sharipzyanov dénonçant les salaires indécents réclamés par Babayev pour ses collèges n’a rien changé aux forces du marché : malgré le déchaînement de haine des réseaux sociaux, même l’espoir sibérien Arseni Gritsyuk est parti au SKA alors qu’il était arrivé (de sa ville natale Krasnoïarsk) à 12 ans à Omsk d’où est originaire sa femme.
Figure fidèle du club, Anton Kuryanov, nommé au poste vacant de manager général par Krylov peu avant son départ, s’est retrouvé avec une situation délicate à gérer : l’effectif avait beaucoup perdu en profondeur et ne tenait plus que par le trio Tkachyov-Knight-Boucher qui formait la meilleure ligne du dernier championnat. Or l’agent de Vladimir Tkachyov n’était autre que… Babayev. Pas d’alternative, sinon de discuter avec lui. Impossible de substituer l’ailier russe par un autre étranger, car il n’y a plus que 3 places autorisées, dont une déjà prise en défense pour la recrue tchèque au slap puissant Libor Šulák.
Les négociations se sont dénouées tardivement fin juillet (car Tkachyov voulait attendre des offres de NHL). L’Avangard avait de la place sous le plafond salarial après les départs. Babayev, qui avait provoqué ceux-ci, était bien placé pour le savoir. Il a donc négocié le plus gros contrat de toute la KHL : 100 millions de roubles (1 million d’euros) pendant trois ans, qui peuvent doubler par des bonus s’il entre dans le top-3 des points ou buts de la ligue ! Babayev a donc gagné sur tous les tableaux, d’autant que le dirigeant d’Omsk avec lequel il avait mené la guerre – Rashid Khabibulin – a été renvoyé fin août.
L’Avangard était d’autant plus obligé de céder dans le cas Tkachyov que le centre de ce premier trio Corban Knight lui échappait au même moment : sa femme ayant refusé catégoriquement d’aller en Russie, il a signé avec Berne. Knight est irremplaçable aux mises au jeu, numéro 1 de la KHL à plus de 60%. Le joueur trouvé à sa place est un moindre mal : Ryan Spooner était vraiment très faible aux engagements dans sa jeunesse, par manque de force, mais a beaucoup travaillé dans ce secteur pour atteindre 53% dans sa dernière saison NHL puis dans sa carrière KHL.
L’autre cador habituel de la Division Chernyshyov, le Salavat Yulaev Ufa, était aussi en crise au printemps, pour d’autres raisons. Le versemnt des salaires avait trois mois de retard, car le déblocage du financement semble toujours complexe dans les arcanes du pouvoir de la République du Bashkortostan. Autre coup porté à l’image du club, le contrôle positif de 7 joueurs de son équipe junior de MHL (le Tolpar Ufa). Ceux-ci ont ouvertement accusé le préparateur physique Igor Zagretdinov de leur avoir injecté et fait absorber sous contrainte des substances interdites… L’accusé – qui officie aussi après de l’équipe féminine Agidel – s’est pourtant vu offrir un nouveau contrat ! Dans un discours d’équilibriste, le directeur général Rinat Bashirov dit ne pas croire les joueurs mais ne pas leur en vouloir d’utiliser ce moyen en défense !
Pour ce qui est de l’équipe première, le principal objectif de l’intersaison était d’améliorer le poste de gardien. Andrei Kareev, habitué aux concurrents étrangers, n’avait plus la confiance du staff qui ne le trouvait pas assez fort mentalement pour briguer le poste de numéro 1. Il ira donc au Spartak. Le Salavat a mis les moyens pour faire venir Aleksandr Samonov – dernier gardien des Russes aux JO avant leur bannissement – de Cherepovets : 50 millions de roubles plus le centre formé au club Daniil Aimurzin. Pour combler le vide ainsi laissé, la principale recrue offensive Aleksandr Sharov (ex-Sibir) doit se réhabituer au centre alors qu’il joue depuis quatre ans à l’aile.
Son coach Viktor Kozlov, lui-même centre quand il était joueur, doit l’y aider. Un Kozlov très critiqué pour son hockey trop défensif. Interviewé par Sport-Express, Bashirov a ainsi déclaré : « Je pense que le fan devrait prendre plaisir à voir un match. […] Faire le spectacle est notre première mission. Je ne dirais pas que nous avons joué un hockey fermé l’an dernier. Nous n’avions juste pas assez de joueurs de grande qualité pour faire la décision. Cette saison nous voulons enlever le poids de la responsabilité du résultat en saison régulière. Je crois que tout le monde a vu que la place au classement ne signifiait rien [NDLR : le Salavat, 3e, avait été éliminé au premier tiers par l’Admiral, 6e]. Si on est sûr de faire les play-offs, pourquoi ne pas faire le spectacle ? »
Mais sera-t-il possible de pratiquer un jeu plus attractif avec une défense vieillissante ? Il manque un profil offensif à ces lignes arrières, et le Salavat est confronté aux réticences des étrangers à rejoindre la Russie : il n’en compte plus qu’un, l’Américain Sasha Chemelevski.
Pour recruter des Nord-Américains en KHL, il est capital d’avoir un compatriote familier pour les mettre en confiance. Le Sibir Novosibirsk a un avantage puisqu’il sera le seul club russe à avoir un coach natif d’Amérique du Nord. En fait, David Nemirovsky a grandi au sein de la communauté russe de Toronto où il a aussi trouvé son épouse. Comme il s’est fait insulter par les enfants de sa classe d’âge du fait de son nom, il dit se sentir plus russe. Même s’il avait pris une année sabbatique pour rester à Toronto auprès de sa famille (après la longue séparation due aux restrictions sanitaires post-Covid) et aider son fils Easton à se développer dans le hockey et rattraper les joueurs de sa génération (2013), il n’est donc pas surprenant de voir Nemirovsky revenir en KHL. Il sait et apprécie que Novosibisk soit une vraie ville de hockey, comme Toronto, et a vite dit oui au directeur sportif Kirill Fastovsky, presque indissociable du Sibir aujourd’hui, mais qu’il avait connu il y a 20 ans au CSKA quand il était joueur.
Cette double culture aide le Sibir à présenter quatre joueurs formés en Amérique du Nord. Fyodor Gordeev, défenseur de 197 cm et 105 kg, partage en effet avec son coach d’avoir grandi à Toronto où sa mère enseigne le russe. Drafté par l’équipe de NHL locale, les Leafs, il ne jouait qu’en ECHL. Sa double nationalité lui permet de ne pas occuper une des 3 places d’étrangers réservées à des cadres : Trevor Murphy, le défenseur numéro 1 à la ligne bleue, Taylor Beck, qui sera le premier centre même si ses ailiers rechignent parfois à travailler avec lui parce qu’il travaille peu défensivement pour ce poste, sont toujours là. Pour remplacer Pyanov en deuxième ligne, un autre Canadien au style différent : Andy Andreoff, centre moins talentueux mais plus complet, physique et fort aux engagements.
Nemirovsky veut garder les bases défensives mises en place par son prédécesseur Andrei Martemyanov, mais veut un jeu sans palet plus agressif et actif dans le patinage. C’est en ligne avec la mission qui lui a été confiée, pratiquer un hockey plus spectaculaire pour remplir la toute nouvelle Sibir Arena de 10 500 places – en photo ci-dessous – et y transposer ainsi l’ambiance effervescente qui faisait le charme de l’ancienne patinoire.
Pour l’Admiral Vladivostok, cette saison doit être celle de la confirmation. Qualifié de manière inattendue pour le deuxième tour des play-offs l’an passé, le petit club ne veut se fixer aucune limite malgré son budget restreint. La clé de voûte du système de jeu très défensif est située dans les cages avec Nikita Serebryakov. Certains se sont inquiétés de son possible départ quand le SKA a recruté l’entraîneur des gardiens de l’Admiral, Yuri Klyuchnikov, l’homme qui l’avait révélé et lui avait donné confiance. Mais la position du club d’Extrême-Orient a été claire : pas question de laisser partir Serebryakov avant sa dernière année de contrat, même si cela signifie qu’il sera agent libre sans restriction l’été prochain et filera sans indemnité de transfert.
Le potentiel offensif reste toujours aussi limité – raison pour laquelle les principes de jeu ne risquent pas de changer. Les attaquants étrangers qui viennent au bord de la Mer du Japon ne sont pas le dessus du panier. Le centre physique Tyler Graovac reste sur une saison moyenne au Vityaz tout comme l’ailier-buteur Giovanni Fiore dans la saison noire des Eisbären Berlin sur le plan collectif. Que vaudra notamment le powerplay sans l’essentiel Libor Šulák à la ligne bleue ? Le Tchèque voulait rejoindre un plus grand club.
Si l’Admiral reste aussi performant, son entraîneur ne pourra qu’en récolter les louanges. Le coach letton russophone Leonids Tambijevs a coupé les ponts avce la majorité de ses compatriotes par son engagement en KHL et voudrait au moins gagner une complète reconnaissance dans cette ligue qui lui a préféré des figures du hockey russe dans l’élection du meilleur coach.
Le problème pour l’Admiral est que son concurrent local, l’Amur Khabarovsk, chasse sur les mêmes terres, mais avec plus d’argent. Le gouverneur ultra-nationaliste Mikhaïl Degtyarev, qui avait déclaré l’objectif de soulever la Coupe Gagarine en 2026, semble toujours y croire. On en a observé les premiers signes avec une réorganisation en coulisse. Aleksandr Mogilny, qui apportait son statut d’ancienne star de NHL et d’enfant du pays mais guère d’activité concrète et/ou de capacité bien identifiée comme président de club, a dû céder sa place à un homme politique, le vice-gouverneur Aleksandr Nikitin. Celui-ci avait fait du club local de bandy (le SKA-Neftyanik) le meilleur du pays… mais en hockey sur glace, cela demandera beaucoup plus de moyens !
Justement, les contraintes budgétaires ont été déverrouillées cette saison. Encore faut-il trouver des joueurs qui viennent de bon cœur. Egor Korshkov a été obtenu pour une compensation symbolique (1000 roubles) du Lokomotiv Yaroslavl, son club formateur qui voulait se débarrasser de lui (et de son gros salaire) et l’a échangé sans le prévenir. Autant dire qu’il a tiré la tronche. L’ancien champion du monde junior, âgé de 26 ans, pourra-t-il se motiver pour relancer sa carrière après deux saisons de déclin ?
De meilleurs résultats pourraient-ils induire un spirale positive et convaincre les joueurs russes d’oublier le décalage horaire et les longs voyages pour venir signer sans rechigner à Khabarovsk ? En attendant, l’Amur doit encore surpayer des étrangers comme Alex Broadhurst (ex-Avangard). La limite des étrangers auraient donc dû frapper durement le club… mais celui-ci a contourné la règle. Si le Slovène Jan Drozg a refusé de se faire naturaliser russe (la Slovénie n’a pas de double nationalité et il tient à jouer en équipe nationale), le Canadien Cameron Lee a accepté ! Son agent Andrei Matveev a révélé lui avoir parlé de cette option dès le mois de janvier, cette astuce n’a donc pas été exploitée seulement par les grands clubs influents.
Lee mène une défense qui paraît assez forte sur le papier. Le nouvel entraîneur Andrei Martemyanov pourrait donc suivre la même stratégie que Tambijevs à l’Admiral pour que le club devienne embêtant à jouer et gagne ainsi en crédiblité.
Juste avant que les naturalisations ne se répandent en Russie, elles se sont arrêtées au Kazakhstan. Des supporters – ou des « activistes » selon le terme de la presse russe – avaient dénoncé les doubles nationalités illégales dans ce pays pour réclamer que le Barys Astana fasse plus de place aux joueurs locaux. L’entraîneur biélorusse Andrei Skabelka a bien compris ce contexte et a noté les progrès de la révélation du championnat du monde Batyrlan Muratov qui a « changé d’attitude et mûri ».
Les dirigeants essaient de ménager la chèvre et le chou, parfois juste pour sauver les apparences. Le manager général critiqué Vyacheslav Belan a officiellement quitté son poste mais continuerait ainsi à tirer les ficelles ! Les espoirs du Kazakhstan qui ont prouvé leur valeur au dernier Mondial devraient avoir un peu plus de place, mais il reste aussi 10 joueurs nés à l’étranger (le chiffre est libre si ce n’est la pression de l’opinion publique car les quotas ne s’appliquent pas aux clubs non russes). Dans un pays qui n’est pas sous sanctions, le Barys met en avant un environnement favorable aux Nord-Américains. Le défenseur canadien Alex Grant est un bon ambassadeur du club, et même l’ancien joueur pendant quatre saisons Curtis Valk a parlé favorablement à un de ses amis, l’attaquant américain d’AHL Joseph LaBate.
Une histoire pourrait entacher cette réputation, mais elle s’est produite après : l’attaquant québécois Michael Chaput, blessé en octobre dernier, avait renoncé à son salaire pendant sa convalescence en échange d’un nouveau contrat pour la saison suivante. Mais quand il a expliqué qu’il ne viendrait que fin août pour suivre les recommandations de ses médecins et être complètement guéri, le Barys l’a licencié pour faute parce qu’il était absent au début du camp d’entraînement. Son agent n’a pas du tout apprécié et a déposé une plainte auprès de la KHL.
Malgré tout, parmi les six Nord-Américains de l’équipe, le niveau moyen s’est relevé d’un cran. Eddie Pasquale est réputé comme l’un des meilleurs gardiens de KHL, même si des dents pourraient grincer s’il barre la route aux internationaux du Kazakhstan. Riley Barber est sur le papier un des meilleurs renforts étrangers de la ligue à l’intersaison puisque l’Américain de 29 ans est à 1 point par match en moyenne sur ses trois dernières saisons en AHL. Si les jeunes joueurs du Kazakhstan se débloquent et prennent confiance dans la durée, il ne faut donc pas négliger le Barys même s’il a fini dernier de la Conférence Est la saison passée.
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